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Rapport

La réparation : Des bénéfices écologiques et économiques encore à promouvoir

Publié le 
Actualisation : Le 20 octobre Christophe Béchu a fait plusieurs annonces notamment : le doublement du montant du bonus pour cinq appareils ; l'augmentation de 5€ sur le bonus réparation existant pour plusieurs produits ; l'éligibilité de 24 nouveaux équipements au bonus réparation dont les écrans cassés des téléphones portables. Ces dispositifs devraient être mis en place au 1er janvier 2024. Les décrets d'application ne sont pas encore publiés.

Introduction

Réussir la transition écologique impliquera notamment de passer d’une économie linéaire (extraire, consommer, jeter) à une économie circulaire (extraire, consommer, entretenir, réparer, recycler). Un tel changement nécessitera de faire évoluer considérablement nos modes de vie quotidiens : il s’agit notamment de favoriser la réparation, le réemploi et le recyclage de nos objets.

Parmi ces trois leviers de l’économie circulaire, nous nous intéressons ici à la réparation, permettant d’allonger la durée d’usage de toute une série d’objets et équipements et, ce faisant, de produire moins de déchets et de faire des économies sur les ressources naturelles nécessaires à la fabrication des biens de consommation. Définie par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) comme « le processus de rétablissement d’un produit défectueux en un état lui permettant de satisfaire à son utilisation prévue », la réparation prend une place croissante en France et suscite depuis plusieurs années l’intérêt des pouvoirs publics, des associations, de la société civile et des entreprises privées.

Un cadre législatif très incitatif a été mis en place pour favoriser la réparation, d’abord avec la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV, 2015) puis avec la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC, 2020). A ces initiatives des pouvoirs publics s’ajoutent celles des acteurs du privé (Fnac-Darty, Boulanger, Murfy…), qui s’engagent afin de proposer des services de réparation plus efficaces et moins coûteux. Il ne faut pas omettre, enfin, la promotion de la réparation par les associations (Halte à l’obsolescence programmée ou ENVIE par exemple) et les initiatives de la société civile (avec les RepairCafé notamment).

Malgré ces efforts conjoints, de nombreux progrès restent à faire : on estime aujourd’hui à 10 millions le nombre de réparations réalisées chaque année, soit 1% des 1,2 milliards d’équipements électriques et électroniques mis sur le marché en France en 2020. Un tiers seulement des 16 millions d’appareils de gros électroménager qui tombent en panne chaque année est réparé, le rachat d’un produit neuf restant l’option majoritaire[2]. Selon Re-fashion, l’éco-organisme de la filière textile, 3,3 milliards de vêtements, chaussures et pièces de linge de maison ont été mis sur le marché en 2022, soit 500.000 de plus qu’en 2021, et seulement 260 000 tonnes ont été collectées. 

Comment s’expliquer ces chiffres ? Divers obstacles, économiques, logistiques ou culturels, le manque d’information pour identifier un réparateur compétent près de chez soi, la tentation de racheter un produit neuf sont autant de limitation au recours à la réparation. Diminuer les coûts de réparation, permettre un accès rapide aux pièces détachées et cesser de privilégier systématiquement le rachat d’objets sont des enjeux décisifs pour favoriser le passage à une économie circulaire.

Pour certains usages (cordonnerie, couture, restauration), l’habitude de réparer ou de faire réparer perdure, mais ces pratiques s’érodent face à l’offre de produits neufs, attractifs et concurrentiels. Les citoyens ont perdu peu à peu les compétences et connaissances techniques permettant d’effectuer eux-mêmes des gestes de réparation simple, et cela pose la question d’une requalification des plus jeunes en particulier, pour réussir à développer massivement la réparation. Néanmoins, les confinements imposés pendant la crise sanitaire ont poussé de nombreux consommateurs à s’intéresser au sujet, comme en attestent les requêtes sur le moteur de recherche Google pour la réparation de l’électroménager, en hausse de 230 % entre 2019 et 2023[3]. Selon une étude Ipsos-Sopra Steria réalisée pour le site Internet eBay publiée en 2023, six Français sur dix (63 %) déclarent essayer de réparer eux-mêmes des équipements électriques lorsqu’ils tombent en panne.

Un des freins majeurs au développement de la réparation reste le modèle d’affaires. La majorité des metteurs en marché n’ont pas intérêt à ce que la réparation se développe. Si elle se généralise, cela engendrera une diminution du volume de ventes et donc à terme une baisse de la rentabilité pour les fabricants et les distributeurs. Sortir de la logique de volume est extrêmement risqué, et, pour de nombreux acteurs, dans un marché concurrentiel, produire moins n’est pas rentable. Pour trouver l’équilibre économique, la réparation doit être valorisée par les consommateurs, qui acceptent de payer un prix de vente plus élevé pour un produit qui se répare mieux et dure plus longtemps.

L’objectif de cette étude est d’évaluer les avancées permises par les divers acteurs du secteur et d’identifier les blocages au développement de la réparation, notamment ceux relatifs au modèle économique de la réparation (formation de la main d’œuvre, coût du travail, pièces détachées). Ce tour d’horizon permettra de dégager dans un dernier temps des propositions pour développer davantage la réparation.

 

1. LA RÉPARABILITÉ DES OBJETS : ÉTAT DES LIEUX

1.1. Définition et cadre réglementaire

Définition

La réparation se distingue de trois autres pratiques : le réemploi, la réutilisation et le recyclage.

L’article L541–1–1 du Code de l’environnement indique les définitions suivantes :

  • Le réemploi : « toute pratique par laquelle des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets sont utilisés à nouveau pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus ». Il s’agit de récupérer des objets avant qu’ils ne soient jetés afin de leur donner une seconde vie. La fonction de l’objet est alors conservée : une roue de voiture est réemployée si elle est toujours utilisée comme roue dans sa seconde vie. Le réemploi est majoritairement porté par des acteurs de l’Économie Sociale et Solidaire (Ressourceries, Recyclerie, Emmaüs, Envie)
  •  La réutilisation : « toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui sont devenus des déchets sont utilisés de nouveau ». Un bien prend le statut de déchet, il subit une opération de traitement des déchets appelée « préparation en vue de la réutilisation » (réparation, contrôle de fonctionnement, nettoyage) puis un propriétaire lui donne une seconde vie. Dans le cas de la réutilisation, l’objet conserve sa forme mais pas sa fonction : une chambre à air de roue peut être réutilisée comme bouée ou comme flotteur
  • Le recyclage : « toute opération de valorisation par laquelle les déchets sont retraités en substance, matières ou produits aux fins de leur fonction initiale ou à d’autres fins ». Dans le cas du recyclage, on ne conserve ni la forme ni la fonction, mais seulement la matière. Par exemple, un pneu est broyé afin de récupérer une poudrette de caoutchouc.
  • La réparation : c’est la remise en fonction d’un bien[4]. Les opérations d’entretien des équipements ne sont pas considérées comme des réparations. La réparation permet d’éviter la production de déchets et le rachat de biens neufs par le consommateur.

L’ensemble de ces techniques ont leur utilité dans le cadre de l’économie circulaire. Cette notion, apparue dans les années 1970, désigne « un système économique d’échange et de production qui, à tous les stades du cycle de vie des produits (biens et services), vise à augmenter l’efficacité de l’utilisation des ressources et à diminuer l’impact sur l’environnement tout en développant le bien être des individus ». [5

ADEME, allongement de la durée d’usage par la réparation est un pilier de l’économie circulaire

 

Contexte législatif

Depuis quelques années, diverses dispositions législatives ont été mises en place afin de promouvoir ce type d’économie. Elles incitent à réduire la production de déchets et font de la réparation une pratique indispensable de la transition écologique.

La loi relative à la consommation du 17 mars 2014 (dite « loi Hamon ») a imposé aux fabricants de fournir les pièces détachées dans un délai de deux mois, sur demande des distributeurs ou réparateurs, et d’informer les distributeurs et les consommateurs de la durée de disponibilité des pièces détachées. Un décret[6] a rendu cette information obligatoire pour tous biens mis pour la première fois sur le marché à compter du 1er mars 2015.

La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (17 août 2015) a inscrit la réparation comme une priorité et a conduit à l’amélioration de la conception des produits en sanctionnant l’obsolescence programmée. Pour rappel, cette dernière consiste à concevoir délibérément un produit pour que sa durée de vie soit réduite. Depuis la loi de 2015, les responsables encourent jusqu’à 2 ans de prison et une amende de 300 000 € pouvant être portée jusqu’à 5% de leur chiffre d’affaires. La législation comporte par ailleurs l’incitation à des expérimentations sur l’affichage de la durée de vie des produits, afin de mieux informer les consommateurs et diminuer l’achat d’objets dont la durée d’usage est réduite[7].

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC) adoptée le 10 février 2020 a complété les mesures précédentes, afin d’inciter davantage à la réparation. Elle consacre dix articles à ce sujet, avec entre autres l’application d’un indice de réparabilité, la création d’un fonds de réparation et l’obligation d’informer le consommateur sur la disponibilité des pièces détachées.

 

    • L’indice de réparabilité

Une des mesures phare de la loi AGEC est la mise en place de l’indice de réparabilité, en vigueur depuis le 1er juillet 2021. Il porte actuellement sur huit catégories de produits (lave-linge, lave-vaisselle, téléviseur, smartphone, ordinateur portable, tondeuse à gazon, nettoyeur haute pression et aspirateur[8]), et permet au consommateur de savoir si son produit est facilement réparable ou non. Une note sur 10 est attribuée par les fabricants eux-mêmes, mais ces derniers peuvent être contrôlés a posteriori par la DGCCRF[9].

Comment cette note est-elle calculée ?[10] Elle dépend des cinq facteurs suivants : le niveau de documentation disponible sur la réparation du produit, la facilité de son démontage, la durée de disponibilité des pièces détachées, le rapport de prix entre les pièces détachées et le prix du produit, et d’autres sous-critères spécifiques au produit (assistance à distance, possibilité de réinitialiser les logiciels ou la carte-mère). L’objectif de ce nouvel indice est double :

– réduire le gaspillage des ressources : en informant les consommateurs sur la réparabilité de leurs produits, ils pourront investir dans des objets plus durables.

– poursuivre la lutte contre l’obsolescence programmée : l’indice incite les fabricants à intégrer dès la conception des critères de durabilité et à assurer une meilleure disponibilité de la documentation technique et des pièces détachées. A l’horizon 2024, la loi AGEC prévoit que l’indice de réparabilité devienne un indice de durabilité, avec l’ajout de nouveaux critères comme la robustesse ou la fiabilité des produits, ainsi que l’écoconception[11].

Cependant, cet indice n’intègre pas encore certaines données économiques comme le coût de déplacement et de main d’œuvre des réparateurs ou le caractère déterminant du rapport entre coût de réparation et coût d’achat. L’étude « les Français et la réparation » fixe à 30% le seuil à ne pas dépasser pour le coût de la réparation versus le coût du neuf. L’indice ne discrimine pas non plus suffisamment des critères déterminants comme la disponibilité des pièces détachées, ce qui peut aboutir à des notations trop favorables par rapport à la réalité (ex. des certains smartphones)[12]. S’il constitue indéniablement une avancée en matière de réparabilité des objets du quotidien, l’effet de cet indice sur le marché n’a pas encore été précisément évalué. Des premières enquêtes montrent néanmoins des pratiques en évolution : intégration du critère de réparabilité dans les critères d’achat, déréférencement ou demande d’amélioration pour les produits mal notés chez les distributeurs, disponibilité des pièces détachées et progrès en écoconception chez les fabricants[13]. Des campagnes d’information sur cet indice ont permis de sensibiliser les consommateurs.

 

  • Le fonds réparation : le cas des d’équipements électriques et électroniques

La mise en place en 2022 d’un fonds dédié au financement de la réparation est l’une des mesures de la loi AGEC. Concrètement, il s’agit de financer une partie de la réparation des équipements électriques et électroniques hors garantie légale. Les consommateurs qui choisissent de faire réparer leurs objets plutôt que de les jeter bénéficient d’un « bonus réparation », qui réduit le coût de la réparation.

Cette réduction représente 10€ pour une bouilloire ou un fer à repasser, 20€ pour une enceinte, 25€ pour un lave-linge et jusqu’à 30€ pour un téléviseur[14]. Pour l’heure, seuls dix types d’équipements électriques et électroniques (EEE) sont concernés par la mesure. La liste des produits bénéficiaires[15] s’étend chaque année et doit couvrir jusqu’à 68 EEE en 2025. Pour être éligible, la panne ne doit pas être due à un défaut caché lors de l’achat ni à un manque d’entretien ou à un mauvais usage.

Comment fonctionne cette aide à la réparation ?

Le fonds de réparation est géré par les éco-organismes des filières REP (Responsabilité Élargie du Producteur). Ce sont les fabricants qui y cotisent à travers l’écocontribution – un montant versé en France afin de compenser le coût de la collecte et du traitement des objets en fin de vie. Les sommes versées au fonds sont ensuite octroyées aux réparateurs, qui acceptent en retour de diminuer d’environ 20% la facture payée par les consommateurs. Toutefois, tous les fonds réparation mis en œuvre aujourd’hui ne suivent pas les mêmes règles. Alors qu’il n’y pas de minimum imposé pour les réparations des équipements électroménagers[16], d’autres filières déclenchent le bonus avec des seuils minimaux de facturation, comme c’est le cas pour les sièges et canapés rembourrés où le prix de de la réparation doit être supérieur à 2,5 fois le montant du bonus[17].

Le schéma suivant présente le fonctionnement du fonds dédié aux EEE :

https://www.aidealareparation.fr/fonctionnement-aide-reparation (Source : Murfy)

Pour bénéficier du bonus réparation pour un équipement électrique et électronique (EEE), le consommateur doit s’adresser à un réparateur « QualiRépar ». Lancée en avril 2022, cette labellisation constitue un point de repère pour les consommateurs souhaitant s’adresser en confiance à un professionnel compétent. Le label est délivré sur des critères de qualité par les deux éco-organismes Écologic et Ecosystem[18]. Tous les types de réparateurs peuvent obtenir ce label, pour une durée de 3 ans : réparateurs indépendants, artisans, réparateurs industriels, services après-vente (SAV) fabricants et SAV distributeurs. En fonction de la taille de la structure de réparation et de la détention ou non de certifications et/ou agréments fabricants, les coûts de labellisation varient. Au démarrage, 400 magasins et 700 réparateurs à domicile étaient labellisés – un chiffre en croissance constante depuis le milieu de l’année 2022, mais qui reste encore aujourd’hui faible.

Si le label apparaît comme une avancée positive pour la structuration de la profession, il suscite aussi l’inquiétude des réparateurs indépendants, notamment quant à la lourdeur du processus et au coût financier et administratif de cette labellisation. Certains y voient l’opportunité d’augmenter leur activité, mais le coût global devrait être réduit, notamment pour les réparateurs qui ont une surface financière plus modeste. Par ailleurs, labelliser certains réparateurs déjà établis n’apporte pas un gain réel au consommateur final. C’est le cas pour la cordonnerie ou la couture. Ces petites structures devraient supporter un coût important pour obtenir la labellisation au regard de leur chiffre d’affaires[19], pour une prestation qu’ils réalisent déjà.

Le dispositif peine également à convaincre les consommateurs. Pour accélérer, le Ministère de la Transition écologique a mis en place, le 15 septembre 2023, un Conseil national de la réparation. Cette instance de contrôle compte parmi ses membres l’État, l’ADEME, des réparateurs, des fabricants, des ONG, des éco-organismes, des professionnels du service après-vente (SAV) et des collectivités. Selon l’association Halte à l’obsolescence programmée (HOP), « Sur un objectif de 4000 réparateurs labellisés d’ici fin 2023, seuls 1600 l’étaient en mai et 1,2 million € avaient été dépensés sur une enveloppe allouée de 60 millions ».

Annoncé un temps pour juillet 2023 par l’État, le doublement des montants du bonus a été reporté par l’État.

 

  • L’utilisation de pièces détachées

En plus de devoir informer les consommateurs sur la disponibilité ou non des pièces détachées (1er mars 2015), la loi AGEC a imposé aux vendeurs, depuis le 1er janvier 2021, de s’assurer de pouvoir mettre à disposition des consommateurs les pièces détachées sous 15 jours ouvrables. Le réparateur a, par ailleurs, l’obligation de proposer au client des pièces détachées issues de l’économie circulaire. L’article 32 de la loi « climat et résilience », publiée au Journal officiel du 24 août 2021, a ouvert partiellement à la concurrence la fabrication et la vente de pièces détachées visibles de véhicules automobiles, mettant ainsi fin en partie au monopole légal des constructeurs automobiles en France. Les conséquences positives dans le secteur de la réparation automobile (concurrence, recours à l’autoréparation)[20] plaident pour une extension de cette obligation à toutes les filières.

Un décret[21] a été publié en 2023 qui impose aux producteurs (fabricants et importateurs) d’outils de bricolage et de jardinage motorisés, d’articles de sport et de loisirs, y compris les bicyclettes, bicyclettes à assistance électrique et engins de déplacement personnel motorisés, de rendre les pièces détachées de ces matériels disponibles pendant la période de commercialisation du modèle concerné ainsi que pendant une période minimale complémentaire après la date de mise sur le marché de la dernière unité de ce modèle.

 

1.2. Le secteur de la réparation

Comment le secteur a-t-il évolué ces dernières années ? Y a-t-il suffisamment de réparateurs sur le territoire français ? Qui sont les différents acteurs de la réparation et quelles solutions apportent-ils ?

Données de cadrage

Le secteur de la réparation[22] représentait en 2022 en France environ 157 000 entreprises, près de 175 000 emplois salariés et 81 000 emplois non-salariés, pour un chiffre d’affaires total d’environ 35 milliards €. C’est le secteur automobile qui représente la plus grande part du secteur, puisqu’il rassemble 59% des entreprises et établissements, 75% des emplois salariés, 59% des emplois non-salariés et 67% du chiffre d’affaires[23]. Ce sont ensuite l’électroménager, les articles de mobilier et de décoration ainsi que les équipements électroniques qui occupent la plus grande part des entreprises, des emplois et du chiffre d’affaires. Les métiers sont variés car un grand nombre de secteurs est concerné par la réparation : dépanneurs en électroménager, réparateurs d’appareils électriques ou électroniques mais également cordonniers, bijoutiers, couturières, restaurateurs de meubles ou tapissiers.

Mis à part le secteur de la réparation automobile, en essor depuis 15 ans, on constate depuis 2006 une baisse générale du nombre d’établissements de réparation et du nombre d’emplois dans la réparation. Mais la tendance tend à s’inverser ces dernières années : depuis 2018, le nombre d’établissements et d’emplois augmente dans tous les secteurs de la réparation, pour retrouver le niveau de 2015. La Loi AGEC a ensuite fortement dynamisé la demande, stimulant ainsi le développement des activités où les indépendants sont nombreux.

ADEME, synthèse panorama offre de réparation, p.8

 

Maillage géographique

Service de proximité, l’offre de réparation dépend du maillage géographique et induit un accès inégal selon le lieu de résidence. La répartition des réparateurs sur le territoire recoupe celle des emplois en France, avec d’une part une concentration dans les grands bassins urbains, et d’autre part, un déficit dans les zones rurales.

  • Le nombre de réparateurs est particulièrement faible en Outre-mer : à Mayotte, en Guyane et en Guadeloupe, on compte moins de 60 réparateurs pour 100 000 habitants, tous biens confondus, hors automobile.
  • En métropole, certains territoires sont aussi en reste : les Hauts de France, la Creuse, l’Ile-et-Vilaine, la Mayenne, la Loire Atlantique, le Maine-et-Loire, la Dordogne, le Rhône et la Haute-Garonne présentent une offre de réparation inférieure à 65 réparateurs pour 100 000 habitants, tous bien confondus, hors automobile.
  • A l’inverse, l’Ile-de-France, la Bretagne (Finistère et Côtes d’Armor), l’Aquitaine, la région PACA, ainsi que le Doubs, la Côte d’Or et la Nièvre bénéficient d’une offre bien développée[24].

Or c’est l’augmentation du nombre de structures, couplée à une répartition équilibrée sur le territoire, qui permettra de déployer une offre de réparation satisfaisante.

 

Compétences du réparateur

Le réparateur se situe entre le concepteur/fabricant et l’utilisateur. La réparation est un type d’activités plutôt qu’un champ de connaissances, c’est un « savoir-comprendre ». Identifier une panne et ses causes suppose une capacité à interroger un système technique et son environnement, grâce à une capitalisation des retours d’expérience, tout en produisant des connaissances nouvelles. C’est ce qui explique que la formation de réparateurs est un très long processus dans l’industrie[25], mais l’acquisition de ces savoirs n’est pas réservée à des techniciens. Des récupérateurs/réparateurs peuvent développer également une véritable expertise à force de « bricoler » les objets[26], et acquérir un regard expert au contact des objets à réparer[27] : cette forme d’apprentissage permet d’identifier la pièce défectueuse à remplacer, alors que des protocoles plus formalisés incitent davantage à remplacer des systèmes[28], ce qui est plus onéreux. Un petit réparateur informatique proposera plus spontanément de changer un composant, plutôt que d’acheter un nouvel ordinateur. Le réparateur prolonge la durée de vie et d’usage de l’objet[29], ce qui est en phase avec les préoccupations sociales et écologiques, et donne du sens à son métier.

Pourtant, on a constaté une baisse des compétences tant chez les professionnels que dans la population. Chez les distributeurs, les équipes doivent envoyer au fabricant ou au réparateur les pièces défectueuses réceptionnées car elles sont devenues dépendantes des fabricants pour les pièces détachées et ont perdu les connaissances nécessaires à la réparation. Ceci allonge les délais de traitement de la panne et incite le consommateur à acheter du neuf car il est sensible à la réactivité de la prise en charge[30]. Le développement des objets connectés implique une adaptation et un élargissement des compétences (diagnostic à distance, connaissance du réseau, analyse de l’environnement)[31]. Dans la population, peu de personnes des nouvelles générations savent coudre, réparer un vêtement ou faire de la plomberie à leur domicile.

 

Développement de la demande de réparation

L’intérêt pour la réparation connait un fort regain. Depuis le milieu de l’année 2021, de nombreux acteurs du secteur ont d’ailleurs observé une hausse du recours à la réparation. Spareka, une plateforme de vente de pièces détachées a constaté un doublement des commandes de pièces détachées. L’entreprise Acer a quant à elle observé une augmentation de 10% de son chiffre d’affaires hors garantie, et Fnac-Darty a vu les demandes de réparation augmenter[32] de 30 à 40% pour les interventions à domicile entre 2018 et 2022.

Plusieurs facteurs expliquent cette évolution positive :

  • Premièrement, la prise de conscience environnementale croissante des consommateurs. Selon l’ADEME, 53% des Français souhaitent consommer mieux et de manière plus responsable[33]. Réparer permet de retarder une dépense mais aussi de lutter contre l’obsolescence des produits.[34]
  • Deuxièmement, l’indisponibilité de certains produits. La crise sanitaire a eu plusieurs conséquences : le confinement a conduit les consommateurs à recourir davantage à la réparation car ils ne pouvaient pas se déplacer, et les tensions sur les chaînes d’approvisionnement ont engendré des retards d’expédition et des pénuries de produits.
  • Enfin, le travail important de communication et de sensibilisation effectué par les pouvoirs publics et les associations en faveur de la réparation (Longue vie aux objets, Répar’Acteurs, RepairCafé) a également contribué à cette prise de conscience.

 

1.3 La recomposition du secteur de la réparation

Si la loi AGEC a clairement redynamisé la réparation, on oublie que ces activités sont anciennes dans de nombreux secteurs (automobile, électroménager, horlogerie…) et souvent pratiquées par des artisans. Sous la pression réglementaire, on voit émerger de nouveaux modèles économiques (ou on les redécouvre). On assiste à une recomposition du secteur de la réparation, portée par des acteurs historiques, par des acteurs économiques qui élargissement leurs propositions de service en se positionnant sur ce créneau, et par de nouveaux entrants. Parmi ces divers acteurs, certains proposent aux consommateurs des solutions innovantes, sur lesquelles nous nous proposons de revenir.

Réparateurs traditionnels

Il y a une vingtaine d’années, s’engager dans une activité de réparation traditionnelle était une gageure : de nombreux professionnels, le plus souvent des petites entreprises, avaient le plus grand mal à trouver des repreneurs (démographie, investissements dans les locaux et l’outillage), et les consommateurs avaient largement tendance à ne pas faire réparer[35].

Certains industriels ont rendu opaque la conception des objets utilisés par les particuliers et ont également organisé la mise à l’écart de réparateurs professionnels qui pouvaient limiter le développement des ventes.

Malgré tout, la réparation automobile « artisanale » a su résister face à la rétention des connaissances techniques organisée par les constructeurs[36]. Pour identifier une panne sur des véhicules dotés de toujours plus d’électronique, il fallait utiliser l’outil de diagnostic fourni par ces derniers, qui paramètrent le produit et qui déterminent qui peut intervenir sur les véhicules et comment.

Les garagistes indépendants ont mis en œuvre un réseau de coopération, d’échanges des savoirs et des services, y compris sous forme marchande, ce qui leur a permis d’acquérir le savoir technique manquant. Ils se sont également libérés des prescriptions commerciales des constructeurs pour s’appuyer sur leur expertise et répondre aux besoins des clients.

Les réparateurs sont susceptibles de subir un contrôle plus ou moins fort de leurs coûts d’intervention par d’autres acteurs, ce qui peut fragiliser leur modèle économique. C’est le cas historiquement des réparateurs automobiles, agréés par les assurances qui ont souhaité limiter le coût de la prise en charge des sinistres[37]. On retrouve le même processus avec les agréments délivrés par les éco-organismes : ils peuvent aboutir à une forme de contrôle du marché, le risque étant qu’un réseau constitué de milliers de réparateurs dépende de ce fonds. Le système du bonus peut également créer des besoins de trésorerie pour les réparateurs, s’ils doivent attendre pour être payés après transmission des justificatifs. Si le consommateur final est gagnant et si les habitudes de mettre en réparation vont se développer, les réparateurs supportent des coûts et des risques nouveaux.

S’inscrire dans des réseaux indépendants mais reconnaissables par les consommateurs est une façon de conforter sa place sur le marché (par exemple, le réseau indépendant « les Répar’acteurs » portés par les Chambres des métiers et de l’artisanat avec le soutien de l’ADEME). Malgré tout, certains artisans ayant une activité suffisante continuent à exercer de façon indépendante sans label.

 

Offres portées de type services après ventes (SAV) (distributeurs et enseignes)

  • Fabricants d’équipements

De nombreux travaux ont montré que les industriels ont développé une stratégie de croissance basée sur le remplacement de leurs produits, soit parce que ces derniers ne sont pas réparables, soit parce que leur réparation n’est pas économiquement rentable, soit encore parce que leur réparation demande des compétences ou un accès à l’information difficile[38]. Ce processus a été à l’œuvre dans tous les secteurs (automobile, équipement de la maison, etc.) et nourri depuis bientôt un siècle par le développement des objets jetables comme moteur d’une économie[39], le recyclage et la perte de compétences des utilisateurs[40].

Au regard de l’offre globale, encore peu de fabricants développent des produits facilement réparables, mais le projet de directive européenne (voir plus loin) les amènera bientôt à diffuser les notices techniques et à mettre en œuvre le droit à la réparation. En créant de nouvelles obligations, le cadre réglementaire pousse les acteurs en place à reconsidérer leurs stratégies historiques et à s’inscrire dans un nouveau paradigme économique. En effet, pour un industriel, fabriquer un objet réparable, c’est accepter (ou subir) que son usage soit plus pérenne, que d’autres acteurs en aient la maîtrise et décident de sa durée de vie, et que ces lieux de décision se multiplient hors de leur contrôle[41].

Certains fabricants ont proposé une offre de réparation depuis longtemps, soit parce que l’activité propose traditionnellement ce service (biens d’équipements, BtoB), soit parce que cela est cohérent avec un positionnement haut de gamme (par exemple, le fabricant de chaussures Paraboot avec un réseau de cordonniers), ou encore parce que ce virage de la réparation et de l’allongement de la durée de vie du produit a été un choix stratégique. Certains fabricants en ont fait un élément différenciant vis-à-vis de leurs concurrents. Comme le rappelle Alain Pautrot, le directeur de la satisfaction consommateurs de SEB[42] : « Notre objectif n’est pas que nos clients changent de fer à repasser pour un fer à repasser neuf, mais qu’ils soient suffisamment satisfaits de leur fer à repasser pour avoir envie d’acheter un aspirateur chez nous quand ils en auront besoin » ; « Comme on conserve un stock de près de 6 millions de pièces détachées, cela nous coûte en général beaucoup moins cher mais surtout, cela nous donne la possibilité de comprendre les défauts de nos produits et de les corriger ».

Mais ce n’est pas le cas de tous. Si Fairphone a été un pionnier dans son secteur, il a été peu suivi depuis sur le modèle d’un équipement électronique facilement réparable..

 

  • Nouvelles offres dans le cadre du service après-vente (offres d’abonnement ou forfait de réparation)

Certains fabricants font de leur service après-vente (SAV) un fer de lance de leur positionnement en faveur de la réparation des équipements, même si le résultat financier en est négatif. Il s’agit pour eux d’un investissement leur permettant de valoriser la qualité de leurs produits.

Le service après-vente permet aux distributeurs de diversifier leurs offres. On voit ainsi apparaitre des offres d’abonnement ou de forfaits de réparation des produits hors-garantie. C’est un modèle qui est surtout proposé pour l’électroménager (gros et petit), les EEE, ainsi que pour les produits d’outillage et de jardin. L’objectif est de garantir au consommateur un coût de la réparation fixe, connu à l’avance et sans devis préalable, afin d’encourager le consommateur à faire réparer son produit. Un tarif fixe constitue une incitation à la réparation, mais cela concerne surtout des équipements importants (gros électroménager typiquement).

Fnac-Darty a lancé l’abonnement Darty Max en 2019. Les consommateurs qui souscrivent à l’abonnement bénéficient d’une réparation gratuite en illimité sur tous leurs produits (gros et petit électroménager, TV, son, photo, multimédia)[43] achetés chez Fnac-Darty, et ce quel que soit l’âge du produit et le nombre de pannes. Le diagnostic, les pièces détachées, la main-d’œuvre sont pris en charge sans frais. Il est même possible de faire réparer des appareils achetés ailleurs que chez Fnac-Darty, moyennant des frais en supplément, payés uniquement à la première réparation. Dans le cas où l’appareil n’est pas réparable, Fnac-Darty s’engage à rembourser les consommateurs en bons d’achat à hauteur du prix neuf du bien dysfonctionnel[44]. L’entreprise a ajouté à son abonnement un service « entretien de vos appareils », qui permet d’anticiper les pannes et d’allonger la durée de vie des appareils. Les consommateurs ont le droit à un contrôle annuel de leurs objets grâce à un appel en visioconférence avec un technicien expert du SAV Darty, et ils peuvent recevoir des conseils personnalisés et des tutoriels pour l’entretien des appareils tout au long de l’année. On compte 4 ateliers de réparation, 80 bases de SAV et plus de 3 000 techniciens dédiés à la réparation de tous les produits, quelle que soit leur provenance. Le service Darty-Max se développe fortement et compte 1 million de souscripteurs en septembre 2023, quelques années seulement après son lancement.

Sur le même modèle, l’entreprise Boulanger a lancé sa propre offre de réparation en 2022, « Boulanger Infinity  ». Il permet aussi de bénéficier d’une réparation gratuite des appareils hors-garanties. Trois tarifs sont également proposés[45].

Ici ces acteurs se sont largement appuyés sur leurs activités historiques de dépannage (« le contrat de confiance  » pour Darty) : déjà dotés d’une organisation matérielle et humaine, ils ont fait évoluer une offre de réparation à la demande vers un abonnement qui leur apporte des revenus récurrents. L’innovation repose sur une base d’actifs existants solide.

 

Réparation proposée par les enseignes

Certaines marques, qui souhaitent se positionner sur un marché haut de gamme et valoriser leurs engagements environnementaux ont ouvert des ateliers de réparation ou les clients peuvent apporter les produits défectueux pour être réparés. Dans le textile, la marque de pulls Eric Bompard a ouvert, des 2002 pour ses clients un atelier parisien dédié à la réparation des produits vendus : au sein d’un atelier de retouche et de remaillage, chaque pull ou accessoire endommagé est pris en charge et réparé.

Décathlon, premier distributeur d’articles de sports et concepteur d’une large gamme de produits, a choisi de faire évoluer son modèle économique en suivant désormais un indicateur de « chiffre d’affaires durable » depuis fin 2019, en comptabilisant les ventes issues de l’atelier de réparation et des pièces neuves nécessaires aux réparations, de la location de matériel et de produits d’occasion. L’objectif est de passer de 5% en 2022 à 15% en 2026[46] par un système de motivation des vendeurs. Actuellement, l’offre de réparation porte sur le vélo et les tentes de camping, mais a vocation à s’élargir à d’autres familles de produits. Cependant, Decathlon ne cherche pas à changer de modèle économique mais se diversifie en y ajoutant un nouveau qui puisse répondre aux demandes des consommateurs[47]. La circularité s’appuie sur quatre axes (allongement de la durée de vie des produits, meilleure recyclabilité, système de reprise et développement de la location)[48].

Il faut noter que durabilité et réparabilité ne recouvrent pas les mêmes notions chez Décathlon : un produit durable ne tombe pas en panne ou ne se casse pas, donc n’a pas ou moins besoin d’être réparé. En 2022, Décathlon comptait plus de 4000 techniciens dédiés à la réparation.

 

 Acteurs de l’économie sociale et solidaire

Au croisement des enjeux sociaux, industriels et environnementaux, l’économie sociale et solidaire compte des acteurs importants de la réparation. Le réseau ENVIE est le plus connu : depuis longtemps associé à des distributeurs en France, il forme des personnes éloignées de l’emploi à la réparation en électroménager et propose une certification « Réparer tous les appareils issus de la filière D3E ». Mais il se positionne aussi sur d’autres flux, comme le matériel médical et les jouets.

 

Acteurs émergents de la réparation

  • Les start-ups

De nombreuses start-ups proposant des offres nouvelles sont apparues ces dernières années sur le marché de la réparation. Voici quelques exemples :

Murfy : Murfy est une plateforme digitale de réparation de produits électroménagers hors-garantie née en 2018. Pour inciter les consommateurs à réparer plutôt que jeter, la plateforme propose plusieurs solutions : un outil d’auto-diagnostic en ligne pour apprendre à réparer seul, un forfait fixe de réparation à domicile avec un technicien expert, une reprise des produits non réparables sous forme de bons d’achat à utiliser exclusivement sur des produits de seconde main. Pour faire face à la pénurie de réparateurs, Murfy a lancé en 2021 la Murfy Académie, école de formation interne à la réparation d’appareils électro-ménagers à Lyon, Lille, Paris et Nantes.

Agence Française des Pièces Détachées : C’est un start-up qui vend des pièces détachées en électroménager. Leur site internet permet de trouver, en indiquant la marque et la référence de son produit, les pièces détachées correspondantes.

Cyclofix : Cette société, créée en 2015, met en relation des réparateurs indépendants, autoentrepreneurs pour la plupart, et les citadins. Fin 2021, la plate-forme réunissait plus de 200 mécaniciens dans 14 agglomérations.

Tilli : Il s’agit d’un service de couturiers à domicile, disponible à Paris, Marseille, Lyon, Aix-en-Provence et Bordeaux, qui propose de retoucher, réajuster, transformer ses vêtements et son linge de maison. Son objectif est de revaloriser le métier d’artisan couturier, d’accompagner les marques dans leur service après-vente et d’encourager les consommateurs à réparer ou upcycler leurs vêtements.

Ces nouveaux acteurs définissent une offre qui répond aux attentes des consommateurs (rapidité, qualité, coût maîtrisé pour le client, informations et valeurs), mais l’enjeu majeur est d’atteindre rapidement un volume d’affaires assez élevé pour générer une rentabilité suffisante et pouvoir perdurer. .

 

  • Places de marché numériques

Les places de marché prennent également part à cette recomposition en offrant de nouveaux services. eBay par exemple a lancé le site eBay réparation. Ce service accompagne les consommateurs qui souhaitent réparer eux-mêmes un produit (aide au diagnostic, identification de la pièce détachée si nécessaire, tutoriels vidéo pour réparer et éventuellement aide en visio).

D’autres acteurs viennent de la vente de pièces de seconde main et du reconditionnement sur site, et proposent, comme Planet Repair, une offre de marketplace.

 

  • Offres d’assurance/réparation des produits électroménagers à domicile (Axa, BNP, Matmut)

Des entreprises comme la MAAF, la MAIF, la Macif ou la Matmut ont développé des offres d’assurance et de réparation des produits électroménagers à domicile en travaillant avec des partenaires tels que le site MesDépanneurs.fr qui permet d’être mis en contact avec un réparateur. Les compagnies bancaires ont aussi développé leur offre en la matière, en proposant des assurances de réparation, pour la plupart axées sur les EEE.

 

Les grossistes en réparation

Dans un contexte de fortes préoccupations environnementales et d’obligations réglementaires, des acteurs proposent désormais des offres spécifiques dédiées aux entreprises. Dans le textile, The Renewal Workshop a ainsi été créé pour permettre aux grandes enseignes (H&M, Champion, etc.) de valoriser des stocks de vêtements qui auraient sinon été détruits.

The Renewal Workshop a ainsi travaillé avec le groupe H&M, via sa marque COS. Ils ont récupéré des lots de marchandise invendable et les ont raccommodés, réparés et réassortis afin qu’ils soient remis sur le marché. Les points de réparation sont situés à proximité de magasins et permettent de traiter des volumes importants (300 pièces) à moindre coût. En 2022, la société a été acquise par un acteur de la supply chain qui souhaite proposer une chaine logistique circulaire.

 

Les initiatives citoyennes

Différentes formes collaboratives d’ateliers de réparation se sont multipliées ces dernières années sur l’ensemble du territoire afin d’accompagner et de former les citoyens à réparer vélos, ordinateurs, électroménager, mobiliers voire automobiles. Ces lieux d’apprentissage permettent d’une part de faire monter en compétences différents publics et d’autre part de sensibiliser et lever certains freins à la réparation.

Le réseau des RepairCafés a été créé en 2009 pour répondre à la disparition des « savoir-faire en réparation » des citoyens, en particulier des plus jeunes, considérée comme une menace pour l’économie circulaire. Un RepairCafé est un atelier consacré à la réparation d’objets et organisé à un niveau local par des personnes qui habitent ou fréquentent un même endroit (quartier ou village par exemple). Dans le lieu choisi, des outils sont mis à disposition pour que les consommateurs puissent réparer l’objet qu’ils ont apporté, avec l’aide des volontaires. C’est un modèle qui permet non seulement de réduire les déchets, mais aussi de venir en aide aux ménages les plus modestes et de renforcer le lien social. En transférant « tours de main précieux » de la part de bénévoles compétents et en mettant à disposition des outils, il s’agit de faire reprendre conscience de la valeur des objets et de la possibilité de les réparer.

Ces dispositifs constituent également une façon de promouvoir les alternatives au tout-jetable et de réorienter le public vers les activités des réparateurs professionnels[49]. Le concept a été repris par de nombreux pays. Il connaît un essor très important, si bien qu’en 2021, on en comptait plus de 350 en France[50].

Les centres d’auto-réparation permettent aussi aux consommateurs de réparer eux-mêmes leurs équipements (souvent vélos, voitures, mais également électroménager). Ils ont accès à un espace (ou un atelier dans la rue), l’aide de personnes compétentes et des outils. Une étude[51] a montré qu’ils permettent de réparer un grand nombre d’objets à un coût compétitif. Ils peuvent être complémentaires des RepairCafés[52].

Dans la même perspective, des associations proposent une offre « globale » pour réduire les déchets (ressourceries, ateliers de réparation et de fabrication, opérations de sensibilisation)[53]. Des fablabs se développent également pour pouvoir réparer les objets en fabricant des pièces difficiles à obtenir ou bien trop chères. Les activités de réparation sont pratiquées dans 86% de ces structures en 2018.

D’autres dispositifs visent à faciliter les échanges de connaissances. Des sites internet fonctionnent comme des forums où chacun est invité à soumettre des demandes ou apporter des réponses (forums, tutoriels, vente de pièces détachées). Des sites tels que commentreparer.com en France ou ifixit.com aux Etats-Unis et en Europe connaissent une large audience et contribuent directement à l’évolution des mentalités et des pratiques. Le reproche adressé à ces structures est de détourner les potentiels utilisateurs des services payants de réparateurs. Ces initiatives offrent en plus d’un usage prolongé des objets, un terreau relationnel[54] et une communauté de pratiques et d’intérêt.

 

2. LES FREINS AU DEVELOPPEMENT DE LA REPARATION

Les avancées sont indéniables, mais le recours à la réparation est encore loin d’être systématique. Si 85% des Français déclarent avoir envisagé de réparer un équipement avant de le remplacer, seuls 50% ont effectivement demandé un devis de réparation au cours des deux dernières années. La réparation est une pratique encore peu ancrée dans les habitudes : seuls 36% des Français réparent un objet (toutes catégories confondues) quand il tombe en panne, quand 54% le remplacent.

Comment expliquer ces blocages ? De nombreux freins à la réparation peuvent être identifiés. Ils relèvent à la fois de la culture, de freins techniques et économiques, du marché et de la réglementation, et concernent l’ensemble des acteurs : les réparateurs, les fabricants, les distributeurs et les consommateurs.

 

2.1 Freins économiques

Les freins économiques sont les plus importants. Pour les consommateurs, la décision de réparer découle d’un arbitrage entre le coût de la réparation et le remplacement par un produit neuf : 53% des Français considèrent que réparer est parfois plus coûteux[55], ou que la réparation ne va pas durer. Le consentement à payer reste encore dépendant du prix du neuf et de la situation économique du consommateur. Un prix peut être jugé hors de portée par certains consommateurs pour qui le manque de ressources financières constitue alors un frein majeur pour réparer un bien essentiel comme une voiture. Ils se tournent alors vers des offres alternatives. Par exemple, l’offre de service des « mécaniciens de rue » se trouve dans la partie informelle du marché. Ces derniers proposent des prix horaires peu élevés (entre 10 et 20 €, avec un forfait selon les réparations) car ils officient dans la rue et disposent d’un outillage limité, tandis qu’un garagiste facturera entre 30 et 50 € l’heure.

Mais, sans contrainte financière forte, on peut aussi préférer l’achat à la réparation quand on valorise peu les compétences et qu’en outre, on considère que les coûts associés à la réparation (temps, énergie et argent) sont très élevés[56]. La difficulté à identifier ou accéder à un réparateur compétent[57] explique aussi le non recours à la réparation.

Les freins économiques sont aussi réels du côté des réparateurs qui ont parfois du mal à proposer des prix attractifs aux clients.

  • Ils font face à de multiples coûts qui viennent alourdir le tarif final de la prestation, notamment les pièces détachées, dont les prix sont en augmentation. Or, pour être attractif, le coût de l’intervention doit être inférieur au coût de remplacement du produit par un appareil neuf. À titre d’exemple, le coût moyen d’un diagnostic est de 30€ pour le petit électroménager, ce qui est supérieur au prix de certains appareils neufs[58]. Les réparateurs doivent prendre en charge le coût des pièces détachées, du stockage des produits, de la main d’œuvre, du transport et de l’outillage et de son environnement. Par conséquent, réparer des objets de faible valeur n’est économiquement pas rentable.
  • Ils sont confrontés au manque de main-d’œuvre qualifiée (moins de 10.000 techniciens en France), dû au faible nombre de formations de techniciens réparateur existantes. Ces dernières années, des entreprises ont choisi de développer leur propre filière de formation (Murfy Académie[59], CFA Fnac-Darty[60]). Cependant, cela coûte cher et le nombre de personnes formées ne répond toujours pas aux besoins et à la demande en forte augmentation, et le marché est toujours en tension. Dans le même temps, les rémunérations des réparateurs sont peu attractives, proches du SMIC[61] [62].

Accéder au gisement de déchets pour avoir des pièces détachées d’occasion est essentiel pour proposer un prix concurrentiel. Or la concurrence s’est accrue entre les différents acteurs privés et associatifs. Un effet négatif du développement de la réparation dans des filières structurées est le tarissement des flux susceptibles d’être captés par les nouveaux venus, mais également par les associations caritatives. Par exemple, les vélos et les tricycles qui ont une certaine valeur sont devenus rares car récupérés par les réseaux les plus structurés (distributeurs récupérant les objets d’occasion, réseaux de réparateurs). .

 

2.2 Freins temporels

Certains équipements nécessitent d’être réparés très rapidement car leur utilisation est quotidienne. Se passer plus de quelques jours d’un réfrigérateur ou d’une machine à laver le linge peut être difficile, notamment pour des familles nombreuses. Si le délai de réparation est trop long, certains consommateurs ont tendance à privilégier l’achat d’équipement neuf.

 

2.3 Freins réglementaires 

Parmi les freins réglementaires[63], on peut noter ce qui relève de la propriété intellectuelle. Par exemple, le fait de diffuser sans autorisation des manuels, ou des schémas, peut faire l’objet de poursuites. Ce frein devrait être levé par la prochaine directive européenne, mais il faudra du temps avant que tous les fabricants assimilent ce nouveau contexte réglementaire. Le manque d’information claire sur les garanties amène les consommateurs à penser qu’ils ne doivent pas procéder à des réparations eux-mêmes ou par des tiers non autorisés. Il y a souvent une méconnaissance des droits du consommateur, qui diffèrent des règles imposées par le fabricant.

 

La garantie légale de conformité : contexte et problèmes

La garantie légale de conformité est l’un des fondements de la politique de protection du consommateur au niveau européen. Le vendeur a l’obligation de vendre un bien conforme au contrat et il est responsable dans le cas contraire[64]. Cette garantie concerne les biens mobiliers (meubles, voitures, ordinateurs, lave-linge…), les biens comportant des éléments numériques (contenus numériques ou services numériques, comme les jeux vidéo…), les biens à fabriquer ou à produire (réalisation de meubles de cuisine ou de fenêtres sur mesure) ainsi que l’eau et le gaz vendus en bouteille ou citerne. Sont couverts : les défauts de fabrication, d’instruction de montage, d’emballage, et de qualité (si le produit ne correspond pas à la présentation du produit acheté). Tous les consommateurs des biens cités disposent d’un délai (de 2 ans dans le cas d’un bien neuf, de 1 an s’il est d’occasion) pour constater un défaut et faire remplacer ou réparer leur bien. Si la réparation ou le remplacement sont impossibles, il est possible de rendre le bien et d’être remboursé ou de le garder et de se faire restituer une partie du prix. En somme, La garantie légale de conformité de 2 ans est obligatoire et elle couvre les défauts qui datent d’avant l’achat[65]. Elle se distingue de :

– La garantie commerciale (désignée par des expressions comme « garantie deux ans », « garantie constructeur », « garantie fabricant »). Celle-ci est facultative et ce qu’elle recouvre est défini librement par le commerçant (pièces, main-d’œuvre…).

– La garantie vices cachés : elle fonctionne sur le même principe que la garantie légale de conformité (elle est obligatoire) mais concerne un plus grand type de biens. Par ailleurs, le délai de garanti (2 ans) des vices cachés ne commence à courir qu’à partir de la date de découverte du vice caché et non au moment où le bien a été délivré.

 

La garantie légale de conformité a des effets ambivalents sur le recours à la réparation, notamment parce que la plupart des consommateurs préfère faire remplacer leur bien plutôt que de le réparer. Certains distributeurs, et en particulier les acteurs en ligne, ont déjà fait le choix de pratiquer l’échange systématique plutôt que la réparation. Alors que certains acteurs développent des modèles plus vertueux essentiellement financés par les interventions hors garanties et la commercialisation d’extensions de garantie, le fait d’étendre la garantie légale encouragerait in fine la pratique du remplacement et donc l’accroissement de la production de déchets.

Afin de limiter cette tendance, l’article 22 de la loi AGEC[66] a mis en place une nouvelle disposition. Depuis le 1er janvier 2022, lors d’un recours à la garantie légale de conformité, si le consommateur choisit de réparer le produit il bénéficie d’une extension de six mois de cette garantie. Une mesure intéressante, qui devrait contribuer à affaiblir la culture du tout jetable.

En revanche, les acteurs de la réparation mettent en garde contre des extensions trop importantes et non-conditionnées de la garantie légale. Porter la garantie légale à 5 ou 10 ans par exemple fragiliserait directement la filière de la réparation, puisque l’activité des réparateurs repose presque exclusivement sur les réparations hors-garantie.

 

2.4 Freins culturels

Le public le plus sensibilisé à la réparation est pour l‘instant surtout jeune, motivé par les bénéfices environnementaux et les possibles économies. Mais certains consommateurs sont peu sensibles à l’intérêt écologique de la réparation et n’envisagent pas cette solution. D’autres n’ont pas confiance et doutent de la qualité du produit une fois réparé. Le recours à la réparation est parfois perçu comme un déclassement par rapport au neuf.

Le manque de connaissances techniques explique aussi le faible recours à la réparation. On ne cherche pas à réparer car on ne sait pas analyser la panne ou bien on ne sait pas identifier un réparateur dans son entourage[67]. Parfois, les ménages attendent trop longtemps pour réparer et l’objet a continué à se détériorer.

2.5 Freins techniques 

Les consommateurs et réparateurs estiment aussi parfois que la réparation se justifie peu au regard de la faible qualité du produit, ou considèrent qu’il n’est pas techniquement réparable. Les réparateurs rencontrent des problèmes liés à la disponibilité des pièces détachées (il n’y a pas de pièces détachées « standards », celles-ci sont souvent spécifiques aux marques, il n’est donc pas toujours évident de se les procurer rapidement) ou à leur stockage. Le manque de traçabilité, comme dans les pièces d’occasion, peut les dissuader de procéder à une réparation. Des aspects très pratiques comme l’encombrement des objets peuvent aussi se révéler bloquants : il n’est pas toujours simple de transporter un meuble encombrant et le déplacer peut être coûteux. Enfin, des outils adaptés peuvent manquer pour de l’autoréparation.

 

3. COMPARAISONS INTERNATIONALES

La France est l’un des pays leader sur la question de la réparation des objets en Europe notamment grâce à un cadre législatif très incitatif. L’indice de réparabilité et le fonds pour la réparation sont les deux initiatives phares par lesquelles la France s’est démarquée de ses voisins européens.

Ces derniers ont également développé leurs propres mesures pour favoriser la réparabilité des produits, qui concernent :

  • La fiscalité : certains pays ont réduit leur taux de TVA dans l’optique de favoriser l’économie circulaire. En Suède, la TVA est passée de 25% à 12% pour la réparation des vélos, des frigos, des machines à laver et des vêtements (2017). D’autres pays comme le Luxembourg, la Pologne, les Pays-Bas, Malte, le Portugal et la Belgique ont également baissé leur TVA pour atteindre des taux de 5 à 8% sur les réparations de vélos, de vêtements et de chaussures. L’Allemagne pratique également des réductions de TVA et a mis en place très tôt un label de durabilité des produits (Blauer Engel, 1978).
  • Allongement des obligations légales :
    • En Belgique, une loi a été adoptée en 2020 pour lutter contre l’obsolescence programmée. Elle a rendu obligatoire l’étiquetage de la durée de vie des produits et encourage les fabricants à proposer des pièces détachées et des manuels de réparation accessibles aux consommateurs.
    • Depuis le 1e janvier 2022 en Espagne, la garantie légale est passée de deux à trois ans. Un choix qui peut avoir des effets ambivalents en matière de réparabilité comme nous l’avons expliqué précédemment.
    • L’Allemagne a tout récemment mis en place l’obligation pour les fabricants d’assurer la disponibilité des pièces détachées essentielles (2021) pour la réparation d’appareils électroménagers pendant une période minimale de 7 à 10 ans selon le type de produit.
  • Le soutien aux activités économiques : L’Allemagne accorde un soutien financier aux centres de réparation et ateliers indépendants.

Outre ces mesures nationales, l’Union européenne envisage depuis peu de mettre en place un cadre juridique contraignant à l’échelle des 27. Le 23 mars 2023, la Commission européenne s’est prononcée en faveur d’un droit à la réparabilité. Le texte doit être examiné prochainement par le Parlement européen et le Conseil de l’Europe (voir encadré ci-après).

 

« Le droit à la réparation » de l’UE[68]

Dans le cadre de la garantie légale, les vendeurs sont tenus de proposer une réparation sauf si celle-ci est plus coûteuse qu’un remplacement.

Au-delà de la garantie légale, un nouvel ensemble d’outils est mis en place pour faciliter une réparation accessible :  

  • Un droit de réclamer une réparation aux producteurs pour les produits techniquement réparables en vertu du droit de l’UE, comme un lave-linge ou un téléviseur par exemple ;
  • Une obligation pour les producteurs d’informer les consommateurs au sujet des produits qu’ils sont tenus de réparer eux-mêmes ;
  • Une plateforme de mise en relation sur la réparation, permettant d’effectuer des recherches par lieu et par normes de qualité. Cela aidera les consommateurs à trouver des offres attrayantes et accroîtra la visibilité des réparateurs ;
  • Un formulaire européen d’information sur la réparation que les consommateurs pourront demander à n’importe quel réparateur et qui apportera de la transparence en ce qui concerne les conditions et le prix des réparations ;

Une norme de qualité européenne pour les services de réparation sera élaborée afin d’aider les consommateurs à identifier les réparateurs qui s’engagent à fournir une qualité plus élevée. Cette norme de « réparation facile » sera ouverte à tous les réparateurs de l’UE soucieux de s’engager à respecter les normes de qualité minimales (durée et disponibilité des produits)

 

Ce texte prolonge la possibilité de réparer pour le consommateur par une forme d’obligation pour le fabricant soit de réparer lui-même soit de permettre au consommateur de faire lui-même la réparation.

 

4. PROPOSITIONS

4.1. Sensibiliser et former les consommateurs à la réparation 

    • Former à la réparation à tous les âges de la vie :
      • Intégrer l’apprentissage de la réparation dans les enseignements obligatoires de technologie, dans le primaire et le secondaire, par de petits exercices pratiques ;
      • Développer des cours/outillages des citoyens (« cours du soir », activités associatives) ;
      • Soutenir des initiatives de type « lutte contre l’illectronisme » dédiées au savoir diagnostiquer et réparer.
    • Développer les usages d’imprimantes 3D (à l’école, en ville, dans les zones rurales) et les formations associées.
    • Sensibiliser davantage les consommateurs à l’importance de l’entretien : former les commerciaux et les responsables de vente pour qu’ils informent sur les bonnes pratiques lors de la vente.
    • Donner des outils pour que les consommateurs puissent arbitrer entre réparation ou une autre option (généraliser notamment l’indice de durabilité aux produits pertinents)

4.2 Renforcer les obligations des metteurs en marché

  • Simplification de la conception et utilisation de composants démontables afin que les consommateurs puissent réparer eux-mêmes.
  • Pousser à la standardisation de certaines pièces détachées notamment dans les appareils électroniques.

 

4.3 Soutenir la formation et l’installation de nouveaux réparateurs

    • Faciliter la création de nouveaux centres de formation sur l’ensemble du territoire : les centres de formation sont encore peu nombreux au regard des besoins en main d’œuvre qualifiée.
    • Intégrer des formations initiales à la réparation, du niveau BEP jusqu’aux écoles d’ingénieur.
    • Favoriser l’installation ou l’embauche des réparateurs issus de l’économie informelle. Mettre en place et financer un parcours de formation adapté à leurs connaissances déjà constituées et à la filière concernée, pour les professionnaliser. Ce parcours peut être mis en place par les acteurs de l’ESS.
    • Une aide à l’installation comme réparateur indépendant peut être envisagée (outillage, locaux).

 4.4 Soutenir le développement des activités de réparation

Fonds Réparation :

    • Élargir le fonds réparation à des objets non visés à ce stade mais avec un fort impact environnemental (exemples : parapluies, pannes logicielles des objets connectés…)
    • Diminuer l’impact du bonus réparation sur la trésorerie des réparateurs, notamment les plus petits, en reversant rapidement le bonus (NB : des évolutions ont été récemment annoncées par les éco-organismes pour passer à 15 jours maximum).
    • Inclure dans le champ d’intervention du fonds de réparation des dispositifs innovants comme les offres d’abonnement à la maintenance et à la réparation qui ont permis de massifier la réparation.
    • Élargir les produits éligibles à l’indice de durabilité.
    • Améliorer la rentabilité de la filière en traitant la question des pièces détachées (exemples : observatoire du prix des pièces détachées, généralisation des pièces détachées compatibles).

Fiscalité :

    • Mettre en place une TVA au taux réduit de 10 % pour les services de réparation conditionnée à l’obtention du label QualiRépar. L’objectif est d’inciter les réparateurs à se faire labelliser et de diminuer le coût de la réparation pour le client. La TVA à taux réduit à 10% concerne aujourd’hui notamment les travaux d’amélioration, de transformation, d’aménagement de l’habitat. Il ne serait pas illogique, dans le même esprit, qu’elle puisse profiter à la réparation de divers équipements.

Labels et processus de labellisation :

    • Homogénéiser les procédures de labellisation des réparateurs, toutes filières confondues pour faciliter l’acte de réparation, et y associer une campagne de promotion puissante (à l’instar de MaPrimeRenov qui a été un identifiant fort pour les travaux d’isolation des bâtiments). Créer un portail et une base de données communs à tous les éco-organismes.
    • Alléger le coût global de la labellisation pour les petits réparateurs : diminuer fortement voire annuler le coût de l’agrément pour les petits réparateurs. Délivrer un seul agrément par réparateur en mentionnant la famille de produits concernés, au lieu de faire payer un agrément par famille de produits. Aider à monter les dossiers d’agrément pour les petites structures.

 

4.5 Rendre les territoires compétents sur l’organisation de la réparation

  • Permettre aux syndicats de traitement des déchets d’orienter, de favoriser les activités de réparation : inciter les syndicats de traitement de déchets à intégrer la réparation dans leurs politiques locales (dispositifs de réparation ou d’accompagnement à la réparation (ex. formation/information) à l’instar des solutions de recyclage).
  • Utiliser les documents d’aménagement pour favoriser l’implantation d’activités liées à l’économie circulaire, dont la réparation. Intégrer dans les PADD (plan d’aménagement et de développement durable) et les PLUi des orientations concernant l’économie circulaire
  • Développer les lieux de réparation (activités commerciales ou espaces collaboratifs) dans les zones moins favorisées, sur les campus, à l’écart des centres urbains

4.6 Partager les données et les connaissances

    • Mettre en open data les statistiques issues des fonds réparation tenus par les éco-organismes pour améliorer la connaissance (marques les plus réparées, coûts moyens par famille et marque, fréquence, âge du parc …) ainsi que la disponibilité des pièces détachées

 

 

Liste des personnes auditionnées

  • Anne Charlotte Bonjean, Ingénieur réparabilité Ademe
  • Vincent Gufflet, Directeur Services et Opérations, Fnac Darty
  • Benoît Godon, Responsable Fonds Réparation, Ecomaison
  • Sarah Schönfeld, membre du Comex et directrice des affaires publiques, Murphy
  • Diane Simiu, Adjointe au Commissaire général au développement durable, Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires 
  • Eric Weisman‑Morel, Directeur Filières, Ecomaison

[1] Baromètre SAV (fnac.com)

[2] https://www.linfodurable.fr/conso/lindice-de-reparabilite-est-reformer-plaide-lufc-que-choisir-29999

[3] Source « Réparer plutôt que racheter : les Français ont franchi le pas » Le Parisien, 21 septembre 2023

[4] Une réparation consiste à remettre en état de fonctionnement un produit ayant subi une panne, une défaillance ou une casse (Ecomaison, Webinaire fabricants et distributeurs, 3 mai 2023)

[5] ADEME – Economie circulaire – Consommation durable – ADEME

[6] Décret 2014–1482 du 9 septembre 2014.

[7] https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000031044385/, 2° du II de l’article L. 131–3.

[8] Elle portait jusqu’au 4 novembre 2022 sur cinq catégories de produits seulement ; les catégories lave-vaisselle, nettoyeur haute pression et aspirateurs ont été ajoutées depuis.

[9] Direction générale de Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes.

[10] https://www.ecologie.gouv.fr/indice-reparabilite

[11] L’écoconception consiste à intégrer l‘environnement dès la conception d’un produit ou d’un service, et ce tout au long du cycle de vie (AFNOR, 2004).

[12] https://www.linfodurable.fr/conso/lindice-de-reparabilite-est-reformer-plaide-lufc-que-choisir-29999

[13] Anne-Charlotte Bonjean, ADEME, In Extenso Innovation Croissance et ODOXA. Retour d’expérience de la mise en œuvre de l’indice de réparabilité, 2022.

[14] Bonus Réparation : quel montant pour votre appareil ? | ecosystem

[15] https://www.label-qualirepar.fr/les-produits-eligibles-au-fonds-reparation/

[16] https://www.aidealareparation.fr/fonctionnement-aide-reparation

[17] soutiens-financiers-fonds-reparation.pdf (label-qualirepar.fr)Présentation PowerPoint (eco-mobilier.fr)

[18] Les critères de labélisation QualiRépar : https://pro.ecosystem.eco/profil/reparateur/qualirepar-comment-se-faire-labelliser. Ecomaison est également en train de développer un réseau de réparateurs agréés.

[19] Voir L’observatoire du Fonds Réparation (CLCV, 1er trimestre 2023) pour une analyse du fonds dédié aux EEE.

[20] https://www.packauto.fr/pratique/lexplosion-du-marche-des-pieces-detachees-automobiles-en-2022

[21] Décret n° 2023–293 du 19 avril 2023.

[22] Données issues du panorama de l’offre de la réparation en France de l’ADEME https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/6092-panorama-de-l-offre-de-reparation-en-france.html

[23] Cette situation risque de changer progressivement à mesure que se développera l’usage de la voiture électrique. Les motorisations thermiques nécessitent en effet un entretien mécanique régulier (vidange, remplacement des filtres, changement des courroies, etc.). La voiture électrique, au contraire, ne nécessite aucun entretien régulier de son moteur qui est infiniment plus simple et connaît beaucoup moins de pannes. Mis à part les pneus, les freins ou encore les accessoires comme les essuie-glaces, le véhicule électrique coûtera bien moins cher en entretien et réparation.

[24] CLCV (2020) Observatoire du fonds réparation, 1er trimestre 2023.

[25] Armand Hatchuel, « Apprentissages collectifs et activités de conception », Revue française de gestion, 41.253, 121–137 (2015).

[26] Jeanne Guien et Violeta Ramirez, « Travailler à consommer : Expérimentation et émancipation dans les pratiques de consommation alternative », Terrains & travaux, 2 (2017): 45–62.

[27] Matthew B. Crawford, Éloge du carburateur. Essai sur le sens et la valeur du travail, La Découverte, 2010.

[28] Denis Giordano, « Apprécier un regard expert dans la débrouille », Revue d’anthropologie des connaissances [En ligne], 14–3 | 2020, mis en ligne le 01 septembre 2020, consulté le 10 septembre 2023. URL : http://journals.openedition.org/rac/10966

[29] Les activités de reconditionnement y sont d’ailleurs étroitement associées.

[30] Anne-Charlotte BONJEAN, ADEME, In Extenso Innovation Croissance et ODOXA. Retour d’expérience de la mise en œuvre de l’indice de réparabilité, 2022.

[31] Réseau Ducretet, Pascal Carcaillon, Bernard Heger. L’impact du développement
des objets connectés sur la réparation, les compétences et la formation – Synthèse – 20 pages, 2017.

[32] https://librairie.ademe.fr/cadic/7185/rex_indice_reparabilite_ieic_odoxa_synthese_juin22.pdf. Rapport de l’ADEME page 12.

[33] https://www.ecologie.gouv.fr/vers-plus-reparation-des-objets-du-quotidien-ministere-transition-ecologique-lance-campagne

[34] Julie, Gobert, Benjamin Tyl, Romain Allais, José-Frédéric Droubaix. 2020. Territoire et Réparation. La recyclerie du futur : living lab de la réparation et de la réutilisation. 103 pages.

[35] ADEME, Panorama de l’offre de réparation en France, Juillet 2007.

[36] Emmanuelle Dutertre et Bernard Jullien, « Les artisans de la réparation automobile face aux constructeurs », Revue d’anthropologie des connaissances [En ligne], 9–3 | 2015, mis en ligne le 01 septembre 2015. URL : http://journals.openedition.org/rac/3046 ; DOI : https://doi.org/10.3917/rac.028.0331

[37] https://www.argusdelassurance.com/dossier-ja/les-relations-du-reparateur-avec-l-assureur-et-l-expert-automobile.49745

[38] Voir les travaux de l’association Halte à l’Obsolescence Programmée (HOP).

[39] Serge Latouche, « Bernard London ou l’enfer des bonnes intentions », Revue du MAUSS, vol. 44, no. 2, 2014, pp. 50–52. DOI : https://doi.org/10.3917/rdm.044.0050

[40] Luce Aknin, Faire avec des objets et des gens. Mémoire de fin d’études. ENSCI Les Ateliers (2015)

[41] Pierre-Damien Huyghe, « Plaidoyer pour une technique hospitalisable », Sociétés services utilités/À quoi tient le design (2015).

[42] SEB cultive la durabilité programmée (lemonde.fr)

[43] Il y a trois offres différentes. La première est proposée à 9,99 € et couvre le gros électroménager. La seconde, à 14,99 couvre, en plus, le petit électroménager, les télés et vidéoprojecteurs, ainsi que les casques audios et autres enceintes. La troisième offre, à près de 19,99 €, permet de faire réparer son ordinateur, sa tablette ou son imprimante.

[44] Dans la limite de 5 000 €, lorsqu’il est irréparable, qu’il a été acheté chez Darty il y a moins de 15 ans et qu’il est toujours dans sa période de réparabilité.​

[45] https://www.boulanger.com/evenement/boulanger-infinity

[46] https://www.novethic.fr/actualite/economie/isr-rse/decathlon-s-appuie-sur-un-chiffre-d-affaires-durable-pour-se-transformer-150978.html

[47] https://hubinstitute.com/2022/DigitalBusiness/HUBDAY/Retail/Data/Replay-Decathlon-EconomieCirculaire-TestAndLearn

[48] https://engagements.decathlon.fr/circulariser-evoluer-vers-une-economie-circulaire

[49] https://www.repaircafe.org/fr/a-propos/

[50] https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/01/02/contre-l-obsolescence-programmee-et-le-tout-jetable-le-succes-grandissant-des-repair-cafes_6107959_3234.html

[51] AGORA, Emmanuel BENOIT – 2017 – Atelier d’auto réparation, Rapport.

[52] Ibidem

[53] L’association Etu’récup sur le campus de Bordeaux-Talence associe à ces activités la lutte contre la précarité.

[54] Aurélien Acquier, Valentina Carbone et David Massé, « À quoi pensent les institutions ? Théorisation et institutionnalisation du champ de l’économie collaborative », Revue française de gestion 43.265, 25–49 (2017).

[55] Étude ADEME sur les Français et la réparation – Perceptions et pratiques, 2019.

https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/336-francais-et-la-reparation-infographies.html

[56] M. Jaeger-Erben, V. Frick et T. Hipp, “Why do users (not) repair their devices? A study of the predictors of repair practices”, Journal of Cleaner Production, 286, 2021.

[57] OpinionWay pour ReFashion, 2021.

[58] Etude ADEME sur les Français et la réparation – Perceptions et pratiques, 2019.

[59] https://murfy.fr/nous-rejoindre/academie

[60] https://www.fnacdarty.com/fnac-darty-inaugure-son-cfa-dentreprise/

[61] https://fr.talent.com/salary?job=R%C3%A9parateur

[62] Réseau Ducretet, Pascal Carcaillon, Bernard Heger. L’impact du développement
des objets connectés sur la réparation, les compétences et la formation – Synthèse – 20 pages, 2017.

[63] S. Svensson-Hoglund, J. L. Richter, E. Maitre-Ekern, J. D. Russell, T. Pihlajarinne et C. Dalhammar. « Barriers, enablers and market governance: A review of the policy landscape for repair of consumer electronics in the EU and the US ». Journal of Cleaner Production, 288, 2021.

[64] 1 Articles L217–1 à L217–14 du Code de la consommation

[65] https://www.economie.gouv.fr/particuliers/garantie-legale-conformite

[66] https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/article_jo/JORFARTI000041553787

[67] Julie Gobert et allii, art. cité.

[68] https://france.representation.ec.europa.eu/informations/droit-la-reparation-la-commission-introduit-de-nouveaux-droits-pour-les-consommateurs-en-vue-de-2023–03–22_fr

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